Malgré mon expertise limitée en matière de critique de livre je souhaite tout de même partager mon humble avis sur l’essai journalistique de Frederic Martel : Global Gay.
Global Gay
Comment la révolution gay change le monde ? À l’heure du mariage pour tous en France, en Angleterre et au Pays de Galle et des avancées considérables dans d’autres pays (États-Unis …) Ce livre est définitivement dans l’air du temps. Grâce à son analyse, on observe les mécanismes à l’œuvre pour émanciper les gays du monde entier. Les différentes stratégies mises en place par les activistes de tous pays afin de promouvoir la tolérance et l’égalité. Ce livre souligne l’aspect global de la question gay et prouve avec brio que la question de genre n’est pas une exclusivité des pays occidentaux.
Cependant, ce n’est pas pour cela exclusivement que je vous recommande ce livre. Grâce aux nombreuses enquêtes de terrain menées par l’auteur on a un aperçu exhaustif du fonctionnement et de l’organisation de la vie gay dans les pays « homophobes » ou réputés moins tolérants notamment la Russie, l’Iran, le monde arabe, l’Asie. Frédéric Martel souligne l’aspect mouvant et changeant des lieux de rencontres, des bars ou des soirées. Plus le pays apparaît fermé sur la question, plus la vie gay est éparse, changeante et insaisissable pour le touriste qui visitera le pays en question quelques jours. Plus qu’un simple essaie je conseille ce livre à tous gays qui souhaite se rendre dans des pays peu avancés sur les questions de genre afin d’organiser au mieux son séjour, dans le respect des cultures (gays) visités, dans l’intérêt de sa sécurité et la sécurité des personnes LGBT rencontrées.
Comme je l’ai déjà précisé dans mon article « voyage de noce dans les pays homophobes », la visite de ses dits pays est importante pour découvrir de nouvelle culture, s’ouvrir l’esprit, relativiser et apporter un regard ou un espoir aux habitants. Mais en aucun cas ces pays ne devraient faire l’objet d’un voyage de « célébration » qui plus est pour des noces. J’encourage clairement au boycotte de l’Ile Maurice pour le voyage de noce, une destination encore plébiscitée par têtu dans son numéro d’été 2013 (numéro 190) ! On n’est pas que des portefeuilles, il y a une éthique dans le voyage et ça me scandalise qu’un magazine comme têtu ou des agences de voyages « spécialisées » promeuvent ces destinations dans le cadre d’une lune de miel gay !
Dans ce même têtu, une tribune libre est adressée par Louis-Georges Tin qui explique les motivations de son départ de l’IDAHO (International Day Against homophobia), un des principaux lobbies pour faire avancer la cause auprès de l’ONU. Il y dépeint les méandres et le désintérêt progressif des diplomates vis-à-vis de la question LGBT. Ce qui vient nuancer le positivisme de Frédéric Martel (et ce qui me permet de revenir à ma critique de livre) vis-à-vis de l’institution. On trouvera dans Global Gay un chapitre consacré au combat mené par un groupe de pays, auprès de l’ONU sous l’influence de plusieurs associations, en faveur de la dépénalisation de l’homosexualité dans le monde entier. L’auteur décrit bien un combat long et complexe et décortique quelques un des rouages de cette machine juridique et diplomatique que sont les nations unis. Merci pour cet éclairage.
Une partie de ce livre est également consacrée à Cuba et comme par hasard une interview de Mariela Castro a été publiée dans ce même têtu … (je ne pensais pas en achetant ce magasine pour mon voyage en TGV qu’il me servirait autant). Il est étonnant de lire les propos rapportés de la « principales défenseure des droits des gays à Cuba » à la lumière des expériences de Frédéric Martel, relatées dans son livre. On appréciera les formules de Mariela du type « Je ne veux pas les qualifier ‘d’erreur’. » en parlant des camps de travaux forcés où les cubains homosexuels jugés anti-révolutionnaires, étaient envoyés. Cela confirme les propos de Frédéric Martel à l’égard de Cuba. Dans son livre il décrit une situation complexe où les homosexuels sont surveillés et où le régime, n’est dans tous les cas, jamais remis en question.
D’autres articles de ce numéro de têtu viennent corroborer et approfondir les thèses de Frédéric Martel. Ainsi au sujet de la Croatie où l’Union européenne permet le développement et la reconnaissance des personnes LGBT. Un phénomène particulièrement mis en avant par l’auteur de Global Gay pour l’avance des droits LGBT dans les pays de l’Europe centrale et orientales. Ces derniers doivent se conformer en terme juridique à certaines normes européenne concernant la reconnaissance des gays dans la société (dépénalisation de l’homosexualité, condamnation de l’homophobie par exemple).
Pour conclure cet article je voudrais adresser un remerciement à cet auteur. Merci d’avoir décrypté les rouages et le fonctionnement de multiples associations et organisations du « monde libre » afin de nous éclairer sur le mouvement qui est à l’œuvre. Mais surtout, merci d’avoir pris le risque d’aller dans ses pays qui refusent l’égalité et l’accès aux droits de l’homme à toutes ses personnes LGBT. Merci d’avoir fait cette enquête pour nous aider, nous gays du « monde libre », à comprendre nos « frères » et leurs situations ainsi que de nous rappeler à nos devoirs de militantisme au nom de toutes ses personnes qui ne jouissent pas de la liberté d’aimer qui elles souhaitent ou même de s’exprimer.
J’en profite également pour remercier tous les lecteurs originaires de pays qui ne sont malheureusement pas encore aussi ouverts que la France. Sûrement grâce à mon article sur Istanbul, je constate un fort trafic en provenance de la Turquie (deuxième pays de lecture) mais aussi d’autres pays arabes qui sont dans le top 10 (je n’ai pas un trafic énorme de toute façon). Et je continuerai à promouvoir la découverte de tels pays dans la dignité des habitants et des personnes LGBT y résidant et non dans l’indifférence qui caractérise le tourisme de masse à l’écart des réalités dérangeantes. J’espère d’ailleurs pour les gays de ses régions qu’ils pourront se procurer ce livre qui suggère de nombreuses façons de militer pour la cause dans le contexte propres à chaque zones en terme de mœurs et de pratiques.